Dénoncer l’obsolescence programmée

Plus qu’un contre-modèle économique, l’obsolescence programmée incarne une philosophie que nous rejetons. Sous l’euphémisme anodin de « cycle de consommation », elle désigne les conséquences du libéralisme le plus effréné : le court-termisme illustré par le culte de l’ « instant présent », qui empêche de se projeter individuellement comme collectivement dans le futur, la relativité des choses et des valeurs, leur jetabilité potentielle – des objets jusqu’aux hommes – voire leur interchangabilité, et l’idée de croissance économique non au bénéfice des civilisations humaines, mais comme fin en soi. Une tendance lourde de l’obsolescence programmée, qui doit être particulièrement combattue, liée à la jetabilité des produits et leur continuel remplacement, est leur non-réparabilité, créée pour dépasser un modèle de consommation jugé archaïque, où le produit conçu pourrait satisfaire les besoins de toute une vie. Le concept d’obsolescence programmée, à l’égal de l’ultra-libéralisme dont il est issu, partage avec lui une grande hypocrisie : ce qui est la norme promue pour l’immense majorité n’est pas celle pensée pour et appliquée par une élite minoritaire toujours plus restreinte en nombre et plus puissante financièrement, pour ne rien dire de son pouvoir politique. Ainsi, concrètement, le concept d’obsolescence programmée concerne pour l’essentiel la grande consommation, celle de 99 % d’une société. On notera inversement qu’une industrie comme celle du luxe – surtout l’extrême luxe – fonctionne sur le principe inverse, celui de l’ « éternité garantie », sans besoin de remplacement. Les problèmes induits par l’obsolescence programmée sont nombreux. Parmi ces problèmes, la pollution figure parmi les plus préoccupants, qu’illustrent la méconnaissance quant au traitement final de certains objets usagés et l’accumulation, au-delà des capacités actuelles de recyclage en France, d’équipements électroniques hors d’usage, partant dès lors vers des pays en voie de développement (Ghana, Inde…) qui ne peuvent pas davantage les traiter. Mais le problème principal, corollaire de la crise énergétique, est que construire des objets prévus pour être obsolescents amenuise considérablement certaines ressources, et notamment certains minerais : lithium, argent, palladium, zinc, indium, plomb, antimoine, or, étain, nickel… tous épuisés dans dix à cinquante ans, si leurs exploitations respectives continuent à ce rythme.

Le gaspillage minimal, une nécessité

On ne peut concevoir le « zéro gaspi » comme un slogan sur une vignette autocollante, mais comme une nécessité écologique de premier ordre. Proclamons sans faiblesse la chasse aux gaspillages industriels, à la surproduction et surconsommation. Il y a quelque chose de surprenant, et finalement de révoltant, de vivre dans une société si riche et si avancée sur le plan de la technique, où les gaspillages demeurent pourtant si importants. Que l’on en juge : dans le monde, 35 % de la nourriture produite est jetée, soit 3,6 millions de tonnes par jour. Contre le gaspillage, il importe également de réduire notre dépendance aux emballages, et d’économiser l’eau – notre bien le plus précieux – notamment en valoriser la récupération des eaux pluviales sur les équipements collectifs.